Face aux enjeux climatiques, la décarbonation ne peut plus se limiter qu’aux activités industrielles. C’est pourquoi, afin de répondre aux attentes du GIEC et viser la neutralité carbone d’ici à 2050, de nombreux projets de capture et de valorisation du carbone ont vu le jour récemment.
Focus sur le projet PYCASSO développé par le pôle AVENIA, lequel sera présenté aux GEODAYS le 14 et 15 juin 2022.
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La géo-ingénierie, une voie ambitieuse de lutte contre les GES
En France, l’industrie manufacturière représente 18 % et l’industrie de l’énergie 10 % des émissions totales de GES en 2019 en France. Ces deux secteurs de l’industrie ont respectivement diminué leurs rejets de 46 % et de 41 % par rapport à 1990. Pourtant, la neutralité carbone du secteur (et même du pays) est visée d’ici à 2050. Dans ce sens, les entreprises doivent à la fois réduire leurs émissions et les compenser. Pour y arriver, deux voies existent :
- D’un côté, il s’agit de produire moins de GES par les efforts globaux et par les technologies.
- De l’autre, il y a la géo-ingénierie et notamment la capture et le stockage géologique du carbone (CSC) voire sa valorisation (CCU). La logique est donc différente : produire moins de carbone ou capturer le carbone produit. La finalité recherchée est en revanche la même : moins de carbone pour limiter les impacts du dérèglement climatique.
Si la première voie vise une plus grande sobriété énergétique, la seconde passe plus par une option purement technologique en réponse aux rejets de GES (bien que la sobriété passe aussi par des technologies moins polluantes).
L’idée de capter le CO2 rejeté fait partie de cette logique de « correction à grande échelle d’effets de la pression anthropique sur l’environnement. » Il s’agit en conséquence de porter un effet sur des mécanismes de la Terre qui ont un impact global sur le système. Dans le cas présent, il s’agit de porter une atteinte sur l’équilibre Terre-atmosphère pour contrer les effets causés par les GES, à savoir le dérèglement climatique et tout ce qui s’ensuit.
Il y a ainsi une voie plus « simple » et de l’autre une voie plus « poussée » et technocentrée, voire qui paraît un peu « folle » scientifiquement. C’est notamment un des vices de la pratique qui pose problème : là où la capacité à capter sans cesse le carbone pourrait devenir une justification cohérente de continuer à en produire face à la sobriété qui deviendrait futile.
En revanche, la force de ces deux techniques est leur complémentarité. Ce sont deux voies complémentaires pour lutter contre le réchauffement climatique et non deux mondes de pensée en totale compétition.
Le projet Pycasso pour décarboner l’industrie franco-espagnole à la frontière
Deux grandes catégories de géo-ingénierie vis-à-vis du problème climatique existent. Il y a :
- Les projets qui portent sur les rayonnements solaires. Il s’agit de mieux les contrôler pour limiter leur participation au réchauffement de la Terre.
- Les projets qui visent les gaz à effet de serre, qui en raison de leur trop grande quantité via les émissions anthropiques, déséquilibrent le système Terre-atmosphère pour causer un réchauffement trop important.
- Les projets qui visent à augmenter l’absorption de CO2 par les êtres qui le font déjà, comme les planctons dans les océans ou les forêts.
- Les projets qui cherchent à piéger le CO2 dans les sous-sols ou dans les roches.
Le projet Pycasso est un projet qui appartient à la famille des projets de capture, de stockage géologique et de valorisation du carbone ou CSC-CCU. Il est dans la lignée de nombreux projets qui existent à travers le monde pour établir une technologie solide de capture du CO2. Les roches basiques mises en relation avec de l’eau sont particulièrement étudiées pour leur capacité à précipiter du CO2 en calcaire lorsque ces dernières entrent en contact avec celui-ci. L’autre option de stockage dans les sous-sols utilise la compression du CO2 pour que celui-ci puisse être injecté dans des couches géologiques profondes.
Développé par le pôle AVENIA dédié aux industries françaises du sous-sol, le projet Pycasso est un projet frontalier entre la France et l’Espagne. Ce projet de territoire vise à « créer un réseau de transport et un hub de valorisation et de stockage du CO2 » en se basant sur « les capacités de valorisation du site de Lacq et les capacités de stockage des champs gaziers. » L’objectif est clair : réduire les émissions de CO2 des industries de la région, du Nord de l’Espagne et de toute la région aquitaine qui s’élève à 13 millions de tonnes de CO2 par an en moyenne. Ce projet se fera par une coordination de tous les acteurs concernés, des collectivités aux émetteurs de CO2 en passant par les organismes de recherches ou les transporteurs et valorisateurs de CO2.
En phase d’avant-projet, le projet PYCASSO sera présenté dans de plus amples détails lors des GEODAYS les 14 et 15 juin 2022 pour finalement voir le jour d’ici à 2030. Le projet doit apporter sa pierre à l’édifice de la neutralité carbone visée par l’hexagone d’ici à 2050 tout en venant compléter la voie sobriété permise par les efforts de chacun et aux énergies renouvelables notamment. Décarboner la société en produisant moins de CO2 et en valorisant ce dernier, tel doit être l’horizon !